France 3 joue la carte de la proximité.

Des catch-phrases plutôt accrocheuses pour une chaîne habituellement timorée, des majuscules, des aplats de couleur et du dégradé : France 3 vient de lancer sa nouvelle campagne (affichage, presse, web) et vise le changement de réputation. Depuis le 1er octobre, la chaîne de télévision généraliste table sur une mise en valeur de sa ligne éditoriale. La marque de fabrique de la chaîne ? Ses sujets de proximité et sa nature de service public.

Avec cette nouvelle campagne, il appartient aux spectateurs complices de deviner ce que la chaîne montre du doigt et promet de ne jamais inclure dans sa grille : Secret Story, reportages alarmistes et séries américaines. Au programme de ce ravalement de façade : une nouvelle signature (« Vous êtes au bon endroit ») et le choix de jouer la carte de la plus value informationnelle, donc.

Sauf qu'après avoir longtemps promis de ne jamais succomber aux sirènes de l'audience facile, l'anciennement dénommée Troisième Chaîne s'était déjà permis un écart : introduire un programme de télé-réalité dans sa grille. C'était en 2010, à l'arrivée de Rémi Pflimlin, directeur de France Télévision, et l'émission s'appelait (elle n'existe plus aujourd'hui) « Repas de famille ». Le pitch de cette petite entorse à la déontologie revendiquée ? Montrer deux familles, qui « ne se connaissent pas et que tout oppose », partager un repas, discuter culture, actualité, famille... À l'arrivée, le programme s'est trouvé à mi-chemin entre voyeurisme non-assumé et conseils culinaires. Ni trop l'un, ni trop l'autre, l'émission a fini par mourir de sa trop faible audience. 

« Les indiens VS les franchouillards »

Eh bien… espérons que France 3 ne remette jamais le couvert. La manoeuvre était effectivement grossière : par mimétisme avec le reste du PAF, la chaîne s'était vautrée dans la télé-réalité, mais avec la bienveillance calculée de ne pas tomber dans le trash. Le résultat fade d'une émission ni provocante, ni intellectuellement stimulante, était donc forcément tombé à plat. S'il-vous-plaît France 3, ne recommencez pas.

À l'heure où la télévision publique, principale source d'informations d'un bon nombre de nos ménages français, écope de fait d'un rôle moral de rigueur et de qualité dans le choix de sa grille, espérons que France 3 honorera ses promesses. À quand une chaîne ni tristement estampillée « chaîne intello » (Arte), ni vulgairement marchande ? À quand une chaîne qui réussira enfin le pari de prendre par la main le français moyen, éveillant sa curiosité sans céder aux caprices d'une télé opium du peuple ?

En attendant, je vous laisse avec cette excellente citation :

« Le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit […] Pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible. »
— Patrick Le Lay  

Votre temps de cerveau libre a une valeur marchande, ne l'oubliez jamais.